Sous la Khaïma, L’extrémisme violent une affaire de tous
L’Association des Gestionnaires pour le Développement (AGD) poursuit ses actions à Sebkha. Dans ce quartier populaire de la capitale elle a réuni de nouveau le samedi 16 février un public intéressé autour du Rôle de la jeunesse dans la prévention de l’extrémisme violent. Pour ce thème, plus que d’actualité, un panel des plus indiqués avec l’Imam Abdoulaye Sarr, l’écrivain Cheikh Nouh, l’inspecteur d’enseignement Cheikh Konaté, Cheikh Tidiane Gueye, directeur d’école, et la jeune activiste Fatou Kiné Diaw.
Sous la modération du journaliste Bios Diallo, les uns et les autres ont offert à l’auditoire des lectures à même de pouvoir comprendre les enjeux qui minent la jeunesse si l’on ne prenait garde sur des mutations qui peuvent vite devenir incontrôlables. « En effet, dit l’Imam Abdoulaye Sarr, nous devons être très vigilants sur les transformations qui s’opèrent sous nos yeux et auxquelles nous semblons accorder peu d’intérêt. Oui, nous ne prêtons pas attention à ce que lisent nos jeunes, nous ne nous interrogeons pas sur la provenance des documents que nous voyons entre leurs mains. Tout comme nous nous préoccupons peu de la compréhension qu’ils peuvent avoir de ces livres, outils, documents audios et vidéos qu’ils écoutent et lisent sans arrêt ». « Or c’est là, poursuit Cheikh Nouh, que se trouvent tous les dangers. Car on a vite transformé une mauvaise compréhension en leçon morale de première importance. Et sans le soupçonner, on sombre à un extrémisme qui peut devenir violent», conclut-il.
Sans surprise, cet état de fait conduit à de multiples situations. Pour Fatou Kiné Diaw, qui se rend régulièrement dans les prisons, « les indicateurs viennent de la marginalité. Un jeune m’a dit un jour sans baisser les yeux « qu’un bandit n’a pas d’avenir ! A 17 ans je n’ai plus de vie, et je n’ai jamais senti la présence de ma famille. Alors, pour moi, poursuit-il, que je me fasse sauter ou que je reste ici en prison c’est du pareil au même ». Devant un tel argumentaire on sent la fragilité de l’esprit qui peut sombrer à toute sorte de tentative. Et si on sait qu’en prison, les auteurs de délits mineurs peuvent se retrouver avec de grands délinquants, trafiquants ou religieux radicaux, on franchit facilement le pas vers l’inconnu. On devient radicalisé, violent ».
C’est là, sans doute que réside toute la vigilance. Qui permet à Cheikh Konaté de rebondir : « Les constats sont dramatiques. Dans mon expérience d’enseignant, j’estime que l’école permet d’éviter ou d’échapper à la radicalisation. Puisque c’est là qu’on peut éclairer sur la mauvaise connaissance ou compréhension du texte de l’Islam. D’où l’impératif de pousser d’avantage la connaissance des enseignants sur une meilleure compréhension du Texte Sacré. Car nous sommes unanimes et conscients que l’Islam ne prône jamais la violence ». « Au contraire, renchérit Imam Abdoulaye Sarr. Il y a même, dans le Coran, des textes qui mettent en garde contre les violences, les déviances et même les replis. Je demanderai simplement que les cellules familiales prennent au sérieux leurs rôles de veille sur l’éducation de leurs enfants, dans les familles comme à l’extérieur de celles-ci ».
Le public ne sera pas muet sur les différentes interventions. Les jeunes, nombreux, soulignent le manque de communications entre les parents et leurs enfants. « C’est un fait que l’on échange très peu avec nos jeunes, nos enfants, reconnait Cheikh Tidiane Gueye. Or, c’est par le dialogue seul qu’on pourra réduire les murs de l’ignorance. Et obtenir la confiance de nos jeunes.»
Les échanges furent vifs, avec beaucoup de pistes de dialogues à enrichir par d’autres rencontres. L’extrémisme violent étant l’affaire de tous. Autant dire que le projet EMELI dénommé « Autonomiser la jeunesse par l’éducation, le leadership et le progrès personnel », financé par l’USAID, a vu bien juste par ce rendez-vous.
Bocar Sow